Trouver un coupable

Avez-vous remarqué cette tendance? On dirait qu’il faut toujours trouver un coupable.

P.ex., une équipe de hockey ne performe pas bien. C’est sûrement pas la faute des joueurs mal entraînés, ou démotivés, ou mal assortis, non: c’est la faute de l’entraineur! Vite, changeons l’entraineur et magie: l’équipe va gagner la Coupe Stanley de l’année!

Ou bien encore, en politique: c’est toujours la faute du chef. Pas des bénévoles sur le terrain, pas des députés, pas des divisions à l’interne, pas des règles politiques. Non, c’est la faute du chef. Changeons de chef, et le parti gagnera majoritaire aux prochaines élections.

Ou encore à l’école: un étudiant n’a pas la note de passage, donc c’est la faute du prof. Ce n’est pas parce qu’il a passé ses cours à texter, qu’il n’a pas étudié, non: c’est la faute du prof qui ne l’aimait pas, ou qui enseignait mal. S’il avait eu un autre prof, il aurait du 100% à son examen final.

C’est lassant, à la fin, cette culpabilisation des autres pour s’éviter une introspection.

Nous sommes tous responsables de nos décisions, de nos actions, ou de nos inactions. Il faut cesser de blâmer les autres et prendre le temps de se regarder dans le miroir pour se parler franchement.

C’est la seule façon de faire changer les choses…

« Je suis fatigué, patron »

Cette phrase de l’incroyable film « La ligne verte » résume mon état d’esprit des derniers temps. Je suis fatiguée.

Fatiguée de devoir marcher sur des oeufs pour ne pas risquer un mot, un geste, qui indisposera quelqu’un autour de moi. Fatiguée de l’hypersensibilité des gens qui grimpent dans les rideaux pour un oui ou pour un non, qui s’inventent de nouvelles « violences », au point où la notion même de violence en perd tout son sens.

Oui, la dernière trouvaille: un accident d’auto n’est plus un accident, c’est de la « violence automobile ». Comme si chaque conducteur était un « méchant » potentiel et souhaitait faire du mal en prenant le volant de son auto pour aller au supermarché acheter la bouffe pour sa famille.

Je suis fatiguée de devoir peser chaque mot pour ne pas risquer de recevoir une flopée de tomates bien mûres par la tête en retour, juste parce que la personne devant moi ne partageait pas mon point de vue et, au lieu de discuter en adultes, préfère « péter sa coche » et me lancer moult quolibets.

« Je suis fatiguée, patron ». Fatiguée de me battre contre des esprits fermés refusant systématiquement de s’ouvrir à plus, à mieux, à différent.

Et pourquoi est-ce si effrayant d’apprendre à voir plus, mieux, différemment? Parce que cela détruit l’illusion qu’on se faisait d’une vie routinière, entre boulot, dodos, métro, télé?

Et si la vie, c’était plus, tellement plus que ça, le p’tit confort soit-disant moderne qui nous maintient dans l’abrutissement d’un quotidien répétitif sans autre but que de bosser pour payer la prochaine facture entre deux séries télé trop souvent tout aussi abrutissantes?

Je suis fatiguée, patron. Fatiguée de réaliser que trop de mes concitoyens refusent le défi même de la vie: grandir, s’ouvrir à plus, mieux, différent. Ouvrir grand nos ailes, et sortir de la cage. La porte est pourtant ouverte, il n’en tient qu’à nous d’en sortir vers… vers tout ce que la Vie peut nous donner de plus, de mieux, de grand!

Noyades…

Dans les cours de natation, on apprend aussi à sauver les gens qui sont en train de se noyer. Une phrase m’est cependant restée en tête: on fait tout ce qu’on peut, mais si on sent que l’autre nous entraine sous l’eau, on lâche tout et on le laisse se noyer.

Une leçon qui s’applique aussi dans les « noyades virtuelles »: vous savez, ces gens qu’on tente d’aider, mais qui finissent par gruger toute notre énergie et nous entraîner dans leur monde sombre?

J’en ai connu quelques-uns des « comme ça ». Au début, ils sont gentils, et semble réellement avoir besoin d’aide. Notre empathie prend le dessus, et on devient « amis ». Puis on tente les mesures de sauvetage habituelles: on les écoute, longtemps, longtemps, nous parler de leurs problèmes. Puis on tente de les aider à s’en sortir avec les conseils habituels: « t’es capable », « tu vas y arriver », « j’ai confiance en toi ». On pousse plus loin quand ça ne fonctionne pas, et on tente de les diriger vers des ressources professionnelles: des groupes d’entraide et de soutien, voire même un soutien psychologique.

Jusqu’au jour où on réalise que ces gens-là ne veulent pas aller chercher de l’aide, qu’ils veulent juste qu’on soit là pour eux, quand ils veulent parler. Jusqu’au jour où cela devient trop lourd pour nous d’aider des gens qui visiblement, ne veulent pas vraiment s’aider eux-mêmes.

Jusqu’au jour où on décide de lâcher prise, et les laisser aller… le tout, bien sûr, non sans ressentir une grosse boule de culpabilité au fond du coeur, car on s’était attachés à ces gens-là, malgré tout.

Mais on sait qu’on était rendu au point de « c’est lui, ou c’est moi » et qu’il fallait survivre – quitte à les laisser se noyer dans leurs problèmes. En se disant qu’en bout de ligne, ils iront peut-être chercher enfin l’aide professionnelle dont ils ont besoin et qu’après, on pourra reprendre contact de façon plus saine?

Alerte! Fraude!

Je commence à en avoir marre des « fraudes électorales ».

Bon ici au Québec, ça a commencé en 1995, avec le référendum: le clan du Oui a perdu, et aussitôt décrété qu’ils avaient gagné, au fond, qu’ils étaient juste victimes de fraude électorale.

Depuis, ce virus se propage: dès que le résultat d’une élection, quel que soit l’endroit dans le monde, déplait à une partie de l’électorat, tout de suite c’est « non non, on a gagné, y’a juste eu une fraude mais on a gagné c’est sûr ».

Bon, je ne dis pas qu’il n’y a jamais d’irrégularités: c’est quand même un processus humain, et comme le disait ma grand-mère: là où il y a des hommes, il y a de l’hommerie.

Oui, il y aura des bulletins de vote rejetés par partisanerie. Oui, il y a aura de bureaux de votes où ça va brasser plus que d’autres. Oui, il y aura des « pas contents » et des « contents ». Et oui, les « pas contents » de ce résultat vont crier à la fraude – mais s’ils sont contents du résultat, ils vont encenser le processus électoral.

Comme quoi la fraude peut facilement être une question de point de vue…

Juste vivre ma vie tranquille…

Oh que je l’ai entendue, celle-là. Quand je commence à discuter politique, histoire, relations internationales, et cie, on me la sert souvent! Question de couper court aux échanges? Incapacité de suivre les échanges? Les deux, sans doute.

Pour ces gens, il est plus important de savoir qui va gagner à Occupation Double ou qui va remporter la Coupe Stanley, que de se renseigner sur ce qui se passe sur notre belle planète.

Sauf qu’OD et la Coupe n’ont pas d’impact sur nos vies. Les guerres, les famines, les volcans, les relations internationales, l’inflation: ça, oui.

On peut vouloir se mettre la tête dans le sable bien profond et resté scotché à TVA: on va subir le contrecoup de tout ce qu’on ne veut pas voir pour « vivre sa vie tranquille » – car la vie ne sera pas si tranquille que ça, en bout de ligne. Avez-vous vu le prix des laitues au Québec depuis quelques semaines? La hausse du prix de l’essence ne vous affecte pas, pendant que vous regardez OD? Ne vous en faites pas, elle vous affectera demain à la station-service.

Vous me direz qu’on n’a pas de contrôle sur ce qui se passe sur notre planète? Euh, sur certains points, c’est vrai. Mais on a le contrôle sur notre façon d’y réagir, ou de planifier en conséquence et s’y préparer.

Bon, je retourne à mon jardinage: faire pousser les laitues à la maison est moins coûteux qu’en épicerie, sans pesticide, relaxant et amusant en prime!

Les gens de nos vies…

Un soir, au hasard de mes souvenirs, je voyais défiler tous ces gens qui ont, un jour, fait partie de ma vie, ceux qui y sont restés, ceux qui en sont sortis…

Pourtant, tous, un jour, ont eu « la première place » dans mon quotidien qu’ils ont partagé à titre d’amis ou d’amoureux. À ce moment précis de ma vie, je ne pouvais pas m’imager leur absence éventuelle. J’étais sûre que c’était « à la vie, à la mort ».

Puis on a cheminé. Chacun à son rythme. Et un jour, force a été de constater qu’on n’était plus rendus à la même place. Que pour avancer encore, il fallait que nos chemins se séparent, car rester dans nos vies respectives en bloquait l’envol vers « plus ».

D’autres se sont pointés simplement pour me « piquer » un peu, me mettre au défi, me pousser vers « autre chose », me confronter avec mes peurs les plus profondes – ils ont eu une présence très intense, mais plus éphémère dans le film de ma vie.

D’autres, eux, sont là depuis « toujours »: même lorsque nos idées ne concordent pas toujours, la confiance réciproque est tellement profonde que les non-concordances de visions deviennent autant de sujets de débats et d’occasions de voir les choses sous un autre angle, permettant une vision plus complète du monde qui nous entoure.

La vie n’est pas « immuable ». Il ne faut pas s’obstiner lorsque des chemins se séparent: il faut simplement s’arrêter à comprendre ce que l’autre est venu nous apporter, pour pouvoir accueillir toutes ces nouvelles personnes qui à leur tour, partageront des jours, des semaines, des années ou des décennies avec nous.

Esprit de contradiction

C’est un de mes célèbres traits de caractère… et oui, j’en suis fière.

Dès qu’on tente de m’obliger à quelque chose, je questionne: pourquoi? Et j’enfile les pourquoi tant que la réponse ne me convainc pas. Et j’ai une imagination très fertile pour trouver des pourquoi…

Dès qu’il me faut « suivre la tendance », je sors du rang, et je fais exactement le contraire de ladite tendance. Combien de fois ai-je répondu « ben quoi, si tout l’monde se lance en bas du pont, faudrait faire pareil »?

Je déteste aussi les phrases toutes faites. Comme le « c’est aussi vrai que c’est vrai que le ciel est bleu ». Je me souviens encore de l’expression de ma prof de français, au secondaire, quand je lui avais rétorqué : « le ciel est parfois orange, parfois rosé, parfois gris et parfois noir, alors hein, pour le ciel bleu, pas sûre, moi. » Ok, par la suite, j’ai harcelé mes profs de science pour comprendre le pourquoi de ces changements de couleurs – mais c’est une autre histoire!

Oui, il suffit qu’on veuille me faire aller dans une direction pour que j’aille dans la direction opposée, qu’on veuille me faire « entrer dans la masse » pour que j’en sorte illico.

Et j’aime ça. Parce que ça m’oblige à réfléchir, à questionner, à chercher des réponses, à me remettre en question, à… m’instruire encore et encore, jour après jour!

« Je fais juste mon travail »

Est-ce qu’on vous a répondu ça, un jour? « Je fais juste mon travail »… pour moi, c’est une excuse parfaite pour ne pas se donner la peine de réfléchir.

C’est une excuse pour agir en robot qui obéit aux ordres – quels que soient les ordres en question. Ne pas penser, ne pas se responsabiliser.

Devenir inhumain, sans émotion, sans empathie. « Je fais juste mon travail », c’est « tu ne m’intéresses pas, ce que tu as à dire ne m’intéresse pas, tu es juste un client, un numéro, une façon pour mon patron de faire du « cash » ».

« Je fais juste mon travail », c’est l’excuse des paresseux peureux.

Parce que faire son travail sans réfléchir, c’est perdre son humanisme. C’est voir l’autre comme un « client » ($) et non un humain.

« Je fais juste mon travail » c’est l’équivalent du « j’ai juste suivi les ordres » si décrié à Nuremberg: l’argument de responsabilité morale et individuelle qui est de plus en plus fréquent dans notre monde moderne. Gros souci de notre époque : personne n’est responsable et tout le monde obéit aux ordres.

On devient des robots. Où sont rendus les humains, les vrais, ceux qui pensent aux autres, qui sont capables de réfléchir sur l’impact de « l’ordre » sur la personne en face d’eux?

Adaptation

S’adapter… ou se fondre dans la masse?

Faire comme les autres – pour ne pas se faire ostraciser « t’as vu comme il est bizarre, lui ». Alors on évite de réagir comme notre conscience ou nos valeurs l’exigent, et on fige dans l’immobilisme. On se cache derrière les autres.

Dire comme les autres – pour ne pas devoir défendre son point de vue « t’as entendu ce qu’il a dit, c’est trop niaiseux ». Alors on se tait, faute d’avoir le courage de s’exprimer. Pourtant, généralement, on les a sous la main, les arguments pour défendre notre point de vue?

Faire semblant de penser comme les autres – dans une conversation, laisser les autres s’exprimer d’abord, pour savoir si on peut exprimer nos pensées – ou si on doit les taire, par peur de déplaire, de sortir du lot, d’être… original. On préfère rester de pâles copies silencieuses.

Ces comportements trop fréquents laissent croire que nous pensons tous la même chose, que nous avons tous les mêmes valeurs, les mêmes croyances, les mêmes idéologies. Ce qui est totalement faux, en bout de ligne.

Oui, ceux qui osent s’exprimer réellement se font mettre à l’écart du « groupe », souvent de façon impolie d’ailleurs, sous l’oeil muet de ceux qui préfèrent garder le silence.

Et alors? Pourquoi on n’est pas honnêtes? Pourquoi on se cache quand on réalise qu’on a un point de vue différent?

À force de réaliser que tout le monde ne pense pas « pareil », nos interlocuteurs vont s’habituer à échanger, dialoguer, se questionner, et réaliser que chacun d’entre nous est un humain unique…

Alors, de quoi on a peur, au juste?

Intimidation…

Depuis quelque temps, il semble que ce mot soit devenu complètement galvaudé. On l’utilise à toutes les sauces. Dès que quelque chose ne fait pas l’affaire, vite: on se dit « intimidé ».

Voici une petite histoire d’intimidation.

Au resto, un groupe de jeunes femmes – à la table voisine, un jeune homme qui sourit à une des jeunes femmes, qu’il trouve jolie. La jeune femme se sent « intimidée » car elle n’a pas sollicité ce sourire. Elle prend la photo du mec, et la publie sur les réseaux sociaux, avec la mention « cet homme m’a intimidée pendant que je déjeunais avec des amies ».

La photo fait le tour des réseaux sociaux. Le jeune admirateur est trainé dans la boue au quotidien.

Qui a intimidé qui, finalement? Le jeune admirateur a simplement souri à une femme qu’il trouvait belle. Mais la jeune femme?

L’intimidation, selon le dictionnaire, c’est : Violence psychologique, verbale, physique, sexuelle ou économique qui ne résulte pas d’une perte de contrôle, mais, au contraire, d’un moyen choisi pour dominer l’autre personne et affirmer son pouvoir sur elle. »

Alors non, sourire à une femme, ce n’est pas de l’intimidation. Endommager des pancartes électorales non plus, d’ailleurs.

Il est temps de cesser de galvauder ce mot pour mieux se présenter en « victime » et de lui redonner sa véritable définition.